Séance du 20 octobre 2012
Présents: Jordi Brahamcha, Brigitte Braud Denamur, Chantal Brière, Patrice Boivin, Pierre Georgel, Jean-Marc Hovasse, Jean-Pierre Langellier, Arnaud Laster, Franck Laurent, Bernard Leuilliot, Junxian Liu, Claude Millet, Claire Montanari, Christine Moulin, Yvette Parent, Emilie Pezard, Myriam Roman, Guy Rosa, Pascaline Wadi, Vincent Wallez.
Informations
Jean-Marc Hovasse signale une édition d’Angelo par l’université de Padoue. Elle est remarquable puisqu’elle ajoute à la transcription de la copie du souffleur, l’édition originale et l’édition Ne varietur ainsi que tous les articles sur la pièce et sa mise en scène publiés dans les journaux de 1835.
Claude Millet et Arnaud Laster signalent un Claude Gueux à l’Opéra de Lyon en mars prochain. Il s’intégrera dans un festival sur le thème de la justice et de l’injustice à l’opéra. Le titre exact est Claude, d’après Claude Gueux, livret de Robert Badinter. Il y aura aussi Fidelio de Beethoven et Le Prisonnier de Dallapiccola, suivi d’un court opéra de Schoenberg. Le Prisonnier est directement inspiré de Victor Hugo avec un passage de « la Rose de l’infante » sur Philippe II, cité textuellement et des souvenirs du Dernier jour d’un condamné. Un n° de L’ Avant-scène Opéra est consultable sur le sujet: n° 212, 2003.
Claude Millet signale à la Maison de Victor Hugo une exposition sur les œuvres surréalistes et le spiritisme.
Discussion avec Godefroy Segal, directeur de la Compagnie théâtrale "In cauda" et metteur en scène
Beaucoup parmi les hugoliens ont pu voir Quatrevingt-Treize adapté et mis en scène par Godefroy Segal à la Maison de la poésie en mai 2012, ou lors de la tournée du spectacle dans de nombreux théâtres et centres dramatiques français. Arnaud Laster souligne que pour trouver des adaptations d’une qualité comparable il faudrait évoquer L’Homme qui rit de Yamina Hachemi ou les Travailleurs de la mer de Paul Fructus.
Le Groupe Hugo s’interroge précisément sur cette vogue des adaptations de romans de Hugo au théâtre, qui concurrencent sur la scène française ses pièces, et en particulier ses drames d’avant l’exil. Godefroy Segal justifie pour ce qui le concerne ce choix d’adapter un roman de Hugo plutôt que de monter un Ruy Blas ou un Hernani par deux raisons, l’une d’ordre poétique, l’autre d’ordre politique.
D’un point de vue politique, les pièces de Hugo lui semblent moins susceptibles de parler immédiatement au public d’aujourd’hui, de l’engager. Les questions politiques en jeu dans le théâtre hugolien ne lui semblent pas aussi actuelles, ni aussi mobilisatrices, que celles que posent les romans. Les romans de Hugo – pas seulement Quatrevingt-Treize, mais Le Dernier Jour d’un condamné, Les Misérables, L’Homme qui rit, continuent à exercer une influence sur la société, pas les pièces. Ce pouvoir-là, Godefroy Segal le reconnaît surtout au dernier roman de Hugo, qu’il comprend comme un testament. Mettre en scène Quatrevingt-treize, cela a été pour Godefroy Segal un « acte citoyen », confiant au vieil Hugo la charge de secouer nos consciences et de transmettre vivante, et complexe, la connaissance de cette gigantesque « montagne » qu’a été la Révolution française.
D’un point de vue poétique, les pièces de Hugo sont, aux yeux de Godefroy Segal, marquées par un lyrisme très difficile à prendre en charge aujourd’hui sur scène, alors qu’au contraire les dialogues romanesques, dans leur allure rapide, abrupte, tranchante, appellent en quelque sorte la voix des comédiens. Les dialogues de Hugo romancier, et Godefroy Segal ne pense pas qu’on pourrait dire la même chose de ceux des autres grands romanciers du XIXe siècle, sont déjà tout faits pour le théâtre. Pour Godefroy Segal, au risque du paradoxe, la théâtralité de Quatrevingt-Treize s’impose et s’est toujours imposée comme évidence, bien plus que celle des drames hugoliens. De là cette adaptation à laquelle il songeait depuis longtemps, en particulier depuis l’époque où, étudiant en philosophie, il suivait le séminaire de Jean Maurel sur les romans de Hugo. Ce qui d’un point de vue dramaturgique l’a écarté des pièces de Hugo ce n’est donc pas la difficile intégration du sublime et du grotesque (qu’on trouve aussi dans le roman, et qu’il ne trouve pas si redoutable), mais le lyrisme, en particulier parce que ce lyrisme suggère ce qui n’est pas montrable ou n’a jamais été vu (en 1830, l’immense majorité du public n’avait jamais vu la mer, ni entendu gronder l’océan), tandis qu’aujourd’hui la prolifération des images invite à un autre rapport de la scène et du visible.
Communication de Claude Millet : Questions sociales 1833-1834 (voir texte joint)
Discussion
Le temps manquait pour qu'il y en eût une.