Jordi Brahamcha-Marin : L’Action française face à Victor Hugo dans l’entre-deux-guerres

Communication au Groupe Hugo du 18 novembre 2017
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L’histoire de l’Action française dans l’entre-deux-guerres est travaillée par un paradoxe[1]. D’un côté, ce mouvement, constitué autour d’un journal (fondé en 1898, devenu quotidien en 1908) et d’une ligue (fondée en 1905), ne parvient jamais vraiment à influencer le cours des événements politiques. Bien sûr, le « coup de force » souhaité par Maurras n’est pas réalisé ; en 1926, la mise à l’index, par le Saint-Siège, du quotidien L’Action française porte un coup d’arrêt à l’essor que le mouvement connaissait depuis la fin de la guerre ; dans les années trente, beaucoup de jeunes militants vont se détourner du royalisme au profit d’autres courants politiques jugés moins vieillots, et notamment des courants fascistes ; même sous le régime de Vichy, accueilli par Maurras comme une « divine surprise », les maurrassiens ne joueront qu’un faible rôle dans les sphères dirigeantes[2]. Les tirages du quotidien L’Action française demeurent, tout au long de la période, somme toute modestes, et tombe à quarante mille en 1939 – à comparer avec les presque deux millions de Paris-Soir, ou, en ce qui concerne la presse politique, les trois cent vingt mille exemplaires de L’Humanité, ou les cent quinze mille exemplaires du quotidien radical L’Œuvre[3]. De l’autre côté, Maurras et ses amis exercent un magistère intellectuel absolument incontestable, au point que le mouvement a pu exercer une certaine attraction intellectuelle sur des écrivains majeurs, comme Gide ou Proust dans les années dix. Les sympathisants du mouvement occupent des positions de force dans certaines institutions culturelles, notamment l’Académie française, où Maurras est élu en 1938 ; avant lui, y avaient déjà été élus plusieurs sympathisants, comme Pierre Benoît et Maxime Weygand (depuis 1931), Abel Bonnard (depuis 1932), Jacques Bainville (élu en 1935, mort l’année suivante), André Bellessort (élu en 1935 également), etc. Maurras et les maurrassiens, quand ils tiennent un discours sur la littérature, sur le romantisme, sur Hugo, ont donc toutes les chances non seulement de se faire entendre, mais encore d’influencer fortement la teneur des débats critiques et les prises de position des critiques – que ce soit, positivement, en rendant hégémoniques certaines de leurs thèses, ou, négativement, en obligeant leurs adversaires à se positionner explicitement contre eux.

 

 

Hugo et l’« aberration romantique »

Ce qui contribue, certainement, à la grande diffusion du discours maurrassien, c’est sa simplicité et son schématisme, notamment dans la critique du romantisme. L’opposition entre classicisme et romantisme, au profit du premier, est fermement articulée à d’autres oppositions binaires également polarisées, comme : ordre vs. désordre ; raison vs. sentiment ; latinité vs. germanité ; Midi vs. Nord ; catholicisme vs. judaïsme et protestantisme ; masculin vs. féminin ; tradition vs. révolte ; etc.[4] Ces oppositions sont exprimées dans la thèse de Pierre Lasserre, en 1907, sur Le romantisme français, mais informent aussi le discours maurrassien de l’entre-deux-guerres, et notamment le retentissant pamphlet que fait paraître, en 1922, Léon Daudet, sur Le stupide XIXe siècle, qui se présente, d’après son sous-titre, comme un « exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis cent trente ans ». Le deuxième chapitre est consacré à l’« aberration romantique » [5]. Comme le suggère le cadrage temporel de l’ouvrage, le romantisme est pris par Daudet dans son extension maximale : il intègre les romantiques stricto sensu mais aussi les symbolistes et les naturalistes, qui en sont vus comme les successeurs. L’auteur donne une liste d’écrivains emblématiques, où Hugo figure aux côtés de Chateaubriand, Michelet, mais aussi Flaubert, Renan, Taine ou Zola. De façon générale, l’ombre de Hugo plane sur l’essentiel du livre : plusieurs des vingt-deux « poncifs » du XIXe siècle que Daudet énumère dans son avant-propos concernent notre auteur (le scientisme, le progressisme, le pacifisme, l’amour de la démocratie, l’attachement à l’instruction laïque), et certains lui semblent même directement empruntés (l’appel à des États-Unis d’Europe) [6]. Hugo est accusé d’avoir donné dans les principaux travers du romantisme, sur un triple plan esthétique (la souveraineté donnée au mot, le primat accordé à l’expression sur le contenu), éthique (le cabotinage, la pose, la sensibilité exacerbée et non contrôlée par la raison), et surtout politique (le libéralisme, le progressisme, le républicanisme).

L’antiromantisme se décline donc, entre autres, en hugophobie : c’est vrai chez Daudet, comme c’est vrai chez Maurras, qui republie en 1926 puis en 1927, sous le titre Lorsque Hugo eut les cent ans, des articles critiques contre Hugo parus en 1901-1902 sous le titre Lorsque Hugo eut les cent ans. On peut aussi se reporter à l’entrée « Hugo » du Dictionnaire politique et critique de Maurras, réalisé par sa collaboratrice Rachel Stefani (sous le pseudonyme de Pierre Chardon), au début des années trente, à partir de textes antérieurs du maître : l’article contient des critiques du même genre que celles de Daudet, avec une attention spécifique portée à la question du verbalisme et de la souveraineté donnée au mot[7]. Plusieurs articles parus dans le quotidien L’Action française confirment cette ligne critique ; signalons aussi, entre autres et en passant, la conférence donnée par Robert Brasillach à l’Institut d’Action française sur « Hugo et le snobisme révolutionnaire » [8], ou les anthologies de la poésie française réalisées, en 1939 et en 1942, par Thierry Maulnier (Introduction à la poésie française) et Kléber Haedens (Poésie française) – nous avons déjà signalé, il y a quelques années, lors d’une séance du Groupe Hugo, le mépris avec lequel Hugo y est traité[9]. Cette hugophobie tient notamment à l’institutionnalisation de la figure de Hugo : attaquer Hugo, c’est aussi, du coup, attaquer toutes les institutions et tous les milieux qui l’honorent. Cet enjeu-là se manifeste bien, en 1925-1926, quand un cours Victor Hugo est créé en Sorbonne : la campagne menée par divers auteurs de droite, dont plusieurs de l’Action française ou proches d’elle, vise à la fois Hugo, la Sorbonne, le monde politique (puisque Édouard Herriot, Louis Barthou ou Raymond Poincaré ont fait partie du comité qui a permis l’ouverture de cette chaire) et certains journalistes, notamment Paul Souday, très hugophile critique du Temps[10].

Si Hugo est une cible privilégiée de l’antiromantisme maurrassien, c’est d’abord parce qu’il passe communément pour l’un des plus grands, ou le plus grand, de nos poètes, et en tout cas pour le premier des romantiques français : l’assimilation synecdochique entre Hugo et le romantisme est naturelle. Mais Hugo ne représente pas toujours, à lui tout seul, tout le romantisme. Ainsi, Hugo et Chateaubriand sont deux cibles privilégiées des maurrassiens, parce que, semble-t-il, il y a entre les deux auteurs une certaine répartition des rôles : chez Daudet par exemple, Chateaubriand représente surtout certaines tares éthiques du romantisme (sensibilité exacerbée, tendance au larmoiement, attitude mélancolique et velléitaire, etc.), alors que Hugo en représente plutôt (avec Michelet) les tares politiques (progressisme, libéralisme, républicanisme : tout cela est équivalent). Cette opposition en rejoue une autre, entre féminité et masculinité, qui, comme nous l’avons rapidement signalé, épouse la distinction maurrassienne entre romantisme et classicisme[11]. Dans certains textes, Maurras propose une lecture misogyne du romantisme comme courant essentiellement féminin, qui fait primer la sensibilité, l’émotion, le désordre, la passivité : c’est le cas dans « Le romantisme féminin », en 1905, où Hugo lui-même est qualifié de poète féminin, sous prétexte qu’il est caractérisé par une « impressionnabilité infinie[12] ». Mais cette interprétation est tout de même contre-intuitive : l’imaginaire critique, en général, tend plutôt à faire de Hugo un poète viril (c’est parfois explicite, par exemple, chez Thibaudet[13]), et à restreindre le stigmate de féminité à des auteurs comme Lamartine ou Musset. Cette vision de Hugo comme poète féminin se trouve exclue du pamphlet de Daudet, pour deux raisons. La première, c’est justement qu’elle est contre-intuitive, et que, comme Marc Angenot l’a montré, l’efficacité du style pamphlétaire repose sur sa soumission paradoxale à la doxa : le pamphlet est un genre assertif plus que démonstratif, qui invoque sans cesse le bon sens, et qui ne saurait prendre trop à rebrousse-poil les intuitions communes[14]. La seconde raison, c’est que Daudet cherche à établir la nocivité politique du romantisme, et qu’à ce titre, il doit accréditer l’idée d’une certaine efficacité politique des auteurs dont il parle : ceux-ci sont donc majoritairement des prosateurs, des auteurs de romans engagés (Zola) ou de prose d’idée (Michelet, Renan, Taine), dont le discours est pris au sérieux, et combattu à ce titre. Or la misogynie antiromantique s’appuie essentiellement sur la dimension lyrique ou élégiaque du romantisme[15], donc sur les registres et les genres les plus typiquement poétiques : le choix de Daudet de se centrer sur un romantisme en prose immunise donc contre ce genre d’attaques. Le seul auteur qui reçoive les stigmates de la féminité est, précisément, Chateaubriand, bien qu’il écrive en prose (Daudet écrit que « René pousse ses thrènes en mode féminin[16] »), parce que c’est le seul de la liste qui soit explicitement royaliste et catholique : dans ce cas, le fait de le ramener à un éthos lyrico-élégiaque censément féminin permet de réduire son discours politique à une posture, à une pose, et donc à ne pas le prendre au sérieux – la démarche est parallèle à celle de Maurras, qui a entrepris ailleurs de montrer qu’il est en fait un anarchiste déguisé[17].

Hugo se trouve donc emporté dans ce mouvement général de prosaïsation et de virilisation du romantisme. Bien sûr, chez Daudet, il reste parfois mentionné comme poète[18] : on ne peut tout de même pas faire comme si la poésie n’était pas, en gros, la partie la plus réputée de son œuvre. Mais dans l’économie générale du chapitre, la poésie de Hugo n’a pas vraiment de prépondérance par rapport aux autres genres qu’il a pratiqués. Et quand c’est sa poésie qui se trouve attaquée, par exemple dans les colonnes de L’Action française, ce n’est pas la poésie lyrique ou personnelle, la poésie du foyer, la poésie du deuil, la lyrique amoureuse, etc., mais soit les textes où Hugo se présente en poète-prophète (« Fonction du poète », dans Les Rayons et les Ombres, fait l’objet de quelques attaques[19]), soit ceux où il déploie une veine militante. C’est bien par là qu’il est jugé dangereux : ainsi Lucien Dubech, critique théâtral à L’Action française, accuse Hugo d’avoir armé la main de Caserio, le jeune anarchiste assassin de Sadi Carnot en 1894, à cause de son vers des Châtiments : « Tu peux tuer cet homme avec tranquillité. »[20] Il nous semble significatif, en tout cas, que Hugo ne soit guère associé aux autres poètes lyriques romantiques qu’il côtoie souvent dans les manuels scolaires (Lamartine, Musset, Vigny), ce qui contribuerait à tirer son œuvre vers d’autres territoires, à lui conférer certains stigmates de féminité, à la décharger partiellement de sa dimension politique au profit d’une dimension éthique.

 

 

Hugo « grand poète »

Cependant, cette centralité de Hugo dans le discours antiromantique a un revers : Hugo finit par valoir moins pour lui-même que pour ce qu’il représente. Dans un texte de 1901 (« Protozoaire ou vertébré : à propos de Victor Hugo »), repris en 1926, dans Lorsque Hugo eut les cent ans, Maurras distingue Hugo de ce qu’il nomme l’« hugolisme », et réserve au second ses flèches les plus acérées : « Hugo, écrit-il, vaut mieux que l’hugolisme[21] ». Cette opposition entre Hugo et hugolisme permet voire suscite, concernant l’œuvre propre de Hugo, des appréciations plus nuancées, voire des éloges partiels, dont il faut maintenant apprécier et commenter la rhétorique.

Car Maurras et les maurrassiens ne peuvent pas tout à fait évacuer l’idée que Hugo est un « grand poète » : après avoir rejeté cette qualification dans un texte de 1900 repris par Chardon[22], Maurras l’utilise cependant, avec quelque réticence, dans « Protozoaire ou vertébré » [23]. Les reproches sont pourtant sévères – mais ils sont aussi vagues, généraux, un peu convenus : Hugo est coupable de s’être complu dans un art « primitif », sans force, sans structure et sans finesse. Surtout, ces griefs ne sont guère appuyés par les textes. Au tournant du siècle Maurras ne se fait pourtant pas faute, dans ses polémiques avec Henri de Régnier, de décortiquer les vers de ce dernier pour en dénoncer, impitoyablement, les faiblesses et les chevilles[24] : force est de constater que Hugo ne subit pas le même outrage. Au contraire, quand des textes précis sont évoqués, mentionnés ou cités, c’est assez souvent en bonne part : dans « Nouvelle réplique, ou la journée de Victor Hugo » (1902), Maurras cite, assez longuement, et favorablement, plusieurs poèmes des Orientales, des Chants du crépuscule, des Voix intérieures ainsi qu’« À Villequier » et « Booz endormi » [25]. Maurras vise là surtout des recueils qu’il reconnaît lui-même comme étant périphériques, et ces textes à sauver sont présentés comme des exceptions au sein de l’œuvre hugolienne ; mais de texte en texte, les exceptions varient, et finissent par proliférer. Dès 1898, Maurras a reconnu l’excellence de Hugo dans l’« invective » et la « satire politique »[26] : il désigne là, très certainement, le poète des Châtiments. Daudet, dans les années vingt et trente, fait lui aussi un vibrant éloge de ce recueil : lors d’une conférence tenue à Bruxelles, il cite de longs passages de nombreux poèmes, avec un enthousiasme très franc[27]. Daudet dit également beaucoup de bien des Choses vues et des Chansons des rues et des bois[28]. Il finit même, dans les années trente, par parler en bien des Contemplations, considérées comme son plus beau et son plus sincère ouvrage – moins « Les mages », tout de même. Maurras, en 1935, sauve l’essentiel des Châtiments, et une partie des Odes et Ballades, des Contemplations et des Chansons des rues et des bois[29]. Ces opinions, d’ailleurs, ne sont pas seulement celles de Maurras et Daudet : elle se retrouvent régulièrement, sous la plume d’autres auteurs, dans les colonnes de L’Action française.

Il semble bien d’ailleurs qu’au cours des années vingt et trente, globalement, le ton des critiques de l’Action française à l’égard de Hugo s’infléchisse dans le sens d’une moindre sévérité, voire d’une sympathie accrue. Léon Daudet lui-même joue un rôle décisif dans cette évolution ; il le peut, à deux titres. Premièrement, il fait figure au sein du mouvement de spécialiste de la question Hugo, à la famille duquel il est lié : il a été l’époux de Jeanne Hugo, petite-fille du poète, de 1891 à 1895, et l’ami intime de Georges Hugo à la fin du XIXe siècle. Deuxièmement, Daudet est de la même génération que Maurras : il peut faire preuve, en matière de critique littéraire, d’une autonomie de jugement que les militants les plus jeunes ne se permettent pas[30], et contredire ou infléchir, à l’occasion, la ligne du maître.

Le point culminant de cette évolution de Daudet vis-à-vis de Hugo se trouve dans son livre de 1937, La tragique existence de Victor Hugo. Le titre du livre peut prêter à confusion, ce qui est peut-être volontaire, mais la lecture dissipe cette confusion : l’existence de Hugo n’est pas « tragique » à cause des malheurs et insanités qu’elle a contribué à répandre sur la France (ce serait une interprétation cohérente avec les thèses du Stupide XIXe siècle), mais bien parce que Hugo a été un homme brisé par les malheurs – malheurs dont Daudet fait la liste : la trahison de sa femme avec Sainte-Beuve, la mort de Léopoldine, l’exil, la folie d’Adèle fille, la mort de ses deux fils, la méchanceté de ses proches – Léon Daudet éprouve une détestation viscérale envers Sainte-Beuve, Vacquerie ou Lockroy. Le tableau d’ensemble rend Hugo bien plus digne de pitié que de détestation. Certes, les éléments à charge ne manquent pas : outre que certains de ces malheurs, comme le cocuage, comportent une part de ridicule, Daudet ne se fait pas faute de rappeler certains vices moraux de Hugo (avarice, vanité, libertinage). Et l’ouvrage utilise massivement des procédés de dégradation burlesque : le motif de la nourriture intervient avec insistance, notamment dans des épisodes qui pourraient sans cela n’être pas dépourvus de grandeur, ou au moins de dignité romanesque (la résistance au coup d’État, la fuite en Belgique[31]). Bref, ce n’est pas là un livre hugophile. Mais ce n’est pas non plus, pas seulement en tout cas, un livre hugophobe : une commisération sincère, une sympathie, s’y donnent bel et bien à lire.

Léon Daudet lui-même nous invite à faire une interprétation biographique de cette évolution. Comme Hugo a perdu sa fille, Daudet a perdu son fils, Philippe, suicidé à quatorze ans en 1923. Puis, après une spectaculaire évasion de prison, il s’est réfugié, deux ans, en Belgique, entre 1927 et 1929. L’expérience du deuil paternel et de l’exil a peut-être poussé l’auteur du Stupide XIXe siècle a davantage d’empathie et de sympathie envers celui des Contemplations et des Châtiments : diverses indications, de Brasillach ou de Daudet lui-même, le laissent entendre[32]. Il est bien sûr difficile de savoir, et peut-être oiseux de se demander, dans quelle mesure cette interprétation biographique accréditée par Daudet lui-même est sincère ou non. Il est aussi fort possible que les événements de sa propre vie servent d’alibi à ses témoignages de sympathie envers Hugo, qui ne sont pas tout à fait ni dans la ligne de Maurras, ni dans celle du Stupide XIXe siècle. Reste que l’évolution du discours est sensible.

Bien sûr, certains secteurs, et non des moindres, de l’œuvre hugolienne, sont irrémédiablement condamnés : le théâtre est éreinté, dans les colonnes du quotidien, par Lucien Dubech[33] ; les romans, eux, sont généralement vus comme des fatras d’incohérence et d’absurdité[34]. Mais pour ce qui est de la poésie, à force d’ajouter des exceptions aux exceptions, on finit par sauver Les Odes et Ballades, Les Orientales, les recueils de la monarchie de Juillet, Les Chansons des rues et des bois, et deux des trois grands recueils de l’exil. On peut essayer de deviner les raisons de ces faveurs. Premièrement, Les Orientales et Les Chansons des rues et des bois témoignent d’une veine fantaisiste, qui doit avoir quelque chose de rafraîchissant pour des gens qui n’aiment pas quand Hugo se prend trop au sérieux ou qu’il joue au mage ou au prophète. En outre la veine des Chansons s’inscrit dans une tradition à la fois classique (celle des Églogues de Virgile) et française : André Bellessort, critique proche de l’Action française mais beaucoup plus hugophile que Maurras et Daudet, parle ainsi à leur sujet de « gauloiseries lyriques[35] », en soulignant leur inscription dans la tradition nationale[36]. Les recueils de la monarchie de Juillet représentent aux yeux de beaucoup de critiques un moment de formation de l’art hugolien, et Maurras, comme d’autres[37], semble y voir des traces (bienvenues) de classicisme. Cet intérêt pour les recueils de la monarchie de Juillet est d’ailleurs typique d’un goût typiquement réactionnaire et avant-guerre : la duchesse de Guermantes, chez Proust, est d’accord avec lui sur ce point[38]. Quant aux Châtiments, leur présence dans la liste pourrait surprendre : ce recueil est emblématique du Victor Hugo républicain de l’exil ; mais il ne faut pas perdre de vue ces auteurs royalistes détestent le Second Empire, presque autant que Hugo. En outre Les Châtiments (comme poésie de l’exil) et « Pauca Meae » (comme poésie du deuil paternel) ont pu être récupérés à la faveur de la superposition biographique, signalée plus haut, entre Hugo et Daudet. Enfin, Daudet semble apprécier les œuvres qui illustrent un genre que lui-même a pratiqué[39] : cet auteur de Souvenirs peut être sensible à la veine mémorialiste des Choses vues, et ce pamphlétaire prolifique (en prose, certes), peut apprécier la verve satirique des Châtiments.

Restent, insauvables, certains poèmes du dernier livre des Contemplations, La Légende des siècles, Dieu et La Fin de Satan. Maurras et Daudet ne peuvent pardonner à Hugo son progressisme, sa philosophie de l’histoire, ses conceptions morales et religieuses, sa métaphysique ; le républicanisme des Châtiments passe finalement beaucoup mieux. Le caractère systématique des doctrines de l’Action française, et la croyance des critiques maurrassiens à la cohérence idéologique du romantisme dans ses diverses dimensions (esthétiques, éthiques, philosophiques, politiques…), les inclinent à distinguer ce qui relève d’un fondement essentiel et ce qui relève d’un phénomène superficiel : à ce compte-là, les opinions politiques positives de Hugo, son républicanisme notamment, paraissent moins dangereuses que leur substrat théorique. C’est ce qui ressort d’un article de Thierry Maulnier paru dans L’Action française en 1935, et qui, de manière inhabituelle, radicalise et explicite cette conception : « Peu nous importe que Hugo ait été ou non démocrate. » Ce qui compte, c’est sa philosophie, qui est simpliste et vulgaire ; La Légende des siècles, ouvrage « d’un primaire éhonté », se trouve explicitement condamnée, avec Les Misérables et, plus généralement, l’ensemble des drames et des romans : ce sont ce simplisme et cette vulgarité qui en font des œuvres ratées[40].

En général, il faut se méfier des critiques qui désignent Hugo comme « poète » ou comme « grand poète » : le terme est souvent pris dans un sens un peu vague, ne renvoie pas nécessairement à la pratique d’un genre déterminé, et exprime seulement une conception implicite qui fait de la poésie le lieu par excellence de la littérature. Chez les maurrassiens, pourtant, si Hugo est parfois – voire souvent – qualifié de « grand poète », c’est bien dans ce sens précis et restreint : hormis Choses vues, seules des œuvres poétiques peuvent faire l’objet d’une certaine admiration. Cette position est très clairement énoncée par Maulnier dans l’article que nous venons de citer[41]. Cela s’explique en partie par la reprise d’une opinion critique qui n’a rien d’original, et qu’on trouve par exemple dans beaucoup de manuels scolaires : la poésie de Hugo serait la meilleure partie de son œuvre. À cela s’ajoute un certain poétocentrisme de la critique littéraire maurrassienne : Maurras appartient à la génération antérieure à celle qui, avec La NRF, va finir par placer le roman au sommet des hiérarchies littéraires ; pour lui comme beaucoup de ses contemporains, c’est dans la poésie que se condense la littérature[42]. Il est vrai que ce poétocentrisme concerne peut-être davantage Maurras que d’autres critiques de son mouvement, notamment Daudet : celui-ci, comme on l’a vu, s’en prend dans Le stupide XIXe siècle à un romantisme qui ne tourne justement pas autour de la poésie. Mais dans ce cas, les idées théoriques implicites de Daudet semblent considérer la prose, notamment la prose d’idée et le roman philosophique, ou le roman à thèse, comme plus dangereuse que la poésie. Cela permet au bout du compte de laisser libre cours à une certaine admiration pour le Hugo poète. Un peu paradoxalement, la poésie de Hugo bénéficie donc à la fois du poétocentrisme général de Maurras, et du fait que les attaques de Daudet ne se concentrent pas essentiellement sur la poésie.

 

 

Conclusion

On peut à présent résumer les principales caractéristiques du discours de l’Action française sur Hugo. Premièrement, on distingue deux tendances contradictoires de la critique maurrassienne : l’une en vertu de laquelle Hugo est condamné, de manière souvent expéditive, pour ce qu’il représente dans l’histoire du XIXe siècle, l’autre qui autorise la production d’un discours timidement hugophile, et en particulier l’appréciation positive d’une partie de son œuvre. Ces deux tendances s’expriment avec plus ou moins de vigueur selon les époques, et selon les critiques : Léon Daudet par exemple semble avoir à la fois un style plus agressif, plus proche de la veine pamphlétaire, que Maurras[43], et un goût moins étroit que lui : il peut prendre en charge la semi-réhabilitation paradoxale de Hugo. Mais une autre approche, plus stimulante, consiste à envisager le discours de l’Action française comme un tout, pour découvrir en son sein des contradictions significatives. Paul Renard note, au terme de son étude sur « La vie littéraire » (la rubrique littéraire de L’Action française), que la critique maurrassienne hésite entre deux pôles : d’un côté elle adopte la rhétorique violente, agressive et destructrice du pamphlet ; de l’autre elle prétend à une pondération, à un esprit de nuance, qui sont des gages de hauteur et de sérieux[44]. On peut voir cela comme une réalisation dans le domaine de la critique littéraire d’une tension à l’œuvre dans la synthèse politique maurrassienne : l’Action française emprunte ses formes d’organisation et d’action aux ligues nationalistes, et son argumentaire idéologique à la pensée la plus conservatrice et traditionnaliste. D’un côté, elle prône et pratique la violence de rue (les Camelots du roi sont fondés en 1908) ; de l’autre, elle professe l’ordre, la modération, la raison. Il n’y a rien d’étonnant à ce que cet ethos clivé se manifeste aussi dans l’ordre de la critique littéraire.

Ni, donc, à propos de Hugo. Les maurrassiens considèrent qu’il y a un consensus autour de la figure de Hugo. Du coup, deux options se présentent : on peut soit prendre de front ledit consensus, et attaquer violemment le romantisme, la république et la Révolution française (c’est ce que fait Daudet dans Le stupide XIXe siècle), soit montrer que l’on est aussi homme de goût, que l’on sait apprécier Hugo dès lors qu’il n’est pas « vulgaire » – cette catégorie paraît centrale, en particulier, dans la critique de Hugo par Maulnier – et qu’il ne raconte pas n’importe quoi. Le congédiement brutal de Hugo, qui se fait selon les codes de la rhétorique pamphlétaire, et son acceptation partielle, qui se fait forcément sur un ton plus nuancé et plus mesuré, constituent les deux termes d’une alternative qui concerne, plus généralement, l’éthos maurrassien en matière de critique littéraire et même de politique.

Cette hésitation à propos de Hugo est donc surdéterminée par des considérations idéologiques et politiques, qui tiennent au fait que les maurrassiens considèrent la littérature comme un champ très hétéronome, ce qui les pousse à donner à Hugo une valeur symbolique. La distinction de Maurras entre Hugo et l’hugolisme va dans ce sens : Hugo, en général, est surtout condamné en tant que représentant du romantisme, du XIXe siècle, de la République, etc. ; il tend à être partiellement épargné quand on regarde ses textes d’un peu plus près. Mais ce statut symbolique, figural, de Hugo, en tout cas, n’autorise guère une plongée sérieuse et précise dans le détail de l’œuvre hugolienne. Les quelques intuitions critiques de Maurras ou de Daudet sur Hugo sont banales, ou reprises à d’autres : force est de constater, au terme de ce parcours, que le discours critique de l’Action française sur Hugo est en général très pauvre, en dépit du fait que les deux principaux maîtres à penser du mouvement ont fait œuvre d’écrivains, de théoriciens et de critiques littéraires. Cette pauvreté critique n’est probablement pas une question d’incompétence : les attaques de Maurras contre Régnier, par exemple, témoignent d’une certaine intelligence critique. Mais la figure de Hugo, beaucoup plus que celle de Régnier, charrie avec elle une série de valeurs et d’enjeux extra-littéraires, de sorte qu’elle appelle immédiatement, beaucoup plus que celle de Régnier, un traitement symbolique qui tend à émousser l’acuité critique.

C’est aussi, comme nous l’avons dit, la rhétorique pamphlétaire qui l’exige : la prise à rebrousse-poil de l’opinion commune, dans un genre aussi faiblement argumentatif que l’est le pamphlet, doit se faire paradoxalement dans un cadre de pensée spontanément acceptable par la doxa. Du coup, comme Stéphane Zékian l’a bien mis en évidence, les antiromantiques de l’Action française déploient leur critique du romantisme dans un schéma historiographique hérité du romantisme[45]. Sur un point en particulier, Maurras et Daudet se montrent remarquablement fidèles à une historiographie romantique, accréditée notamment par Hugo, et qui, en réalité, est un coup de force : celle qui associe avant-garde littéraire et avant-garde politique. Quand Maurras écrit, en 1922, « Romantisme est Révolution[46] », il dit à peu près la même chose que Hugo proclamant, dans la préface d’Hernani, que « le romantisme […] n’est à tout prendre […] que le libéralisme en littérature ». Peut-être bien, d’ailleurs, a-t-on là une autre raison de la centralité de Hugo dans le discours antiromantique des maurrassiens : c’est, fondamentalement, dans les termes de Hugo que l’on pense le romantisme (en inversant, bien entendu, l’axiologie) ; et ce romantisme que l’on attaque est, pour partie, un objet littéraire qui est, paradoxalement, une invention critique de ce même Hugo.


[1] Paradoxe exploré par une série de colloques sur L’Action française organisés entre 2007 et 2009. Voir Olivier Dard, Michel Leymarie, introduction à Olivier Dard, Michel Leymarie, Neil McWilliam, Le maurrassisme et la culture. L’Action française : culture, société, politique (III), Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Histoire et civilisation », 2010, p. 14.

[2] Gisèle Berstein, Serge Berstein, Dictionnaire historique de la France contemporaine, Paris, Éditions Complexe, Bibliothèque Complexe, 1995, p. 3-5.

[3] Jean Mottin, Histoire politique de la presse, 1944-1949, Paris, Bilans hebdomadaires, 1949, p. 23-26.

[4] Voir par exemple Yaël Dagan, « La Nouvelle Revue française » entre guerre et paix (1914-1925), Paris, Tallandier, 2008, p. 288.

[5] Léon Daudet, Le stupide XIXe siècle (1789-1919) [1922], in Léon Daudet, Souvenirs et polémiques (éd. Bernard Oudin), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1992, p. 1219-1252.

[6] Léon Daudet, Le stupide XIXe siècle (1789-1919), op. cit., p. 1188.

[7] Charles Maurras, Dictionnaire politique et critique, vol. 2 (éd. Pierre Chardon), Paris, À la cité des livres, 1932, p. 254-258.

[8] Robert Brasillach, Hugo et le snobisme révolutionnaire, Paris, L’Inédit, 1985. Cette édition n’indique pas la date de la conférence.

[9] Jordi Brahamcha-marin, « La poésie de Victor Hugo dans les anthologies (1913-1942) » [en ligne], site du Groupe Hugo : http://groupugo.div.jussieu.fr/Groupugo/14-05-24brahamcha.htm, s. d. (communication du 24 mai 2014), consulté le 20 novembre 2017.

[10] C’est ce qui ressort de l’examen du dossier de presse conservé à la Bibliothèque nationale de France (département Arts du spectacle) sous le titre La chaire de Victor Hugo à la Sorbonne : article (sic) de presse, 1925-1935 (cote 4-RF-28305).

[11] Sur la dimension misogyne de l’antiromantisme en général, et de l’antiromantisme maurrassien en particulier, voir par exemple Antoine Compagnon, « Maurras critique », Revue d’histoire littéraire de la France, vol. 105, no 3, juillet 2005, p. 524-525 ; Neil McWilliam, « Qui a peur de George Sand ? Antiromantisme et antiféminisme chez les maurrassiens », in Olivier Dard, Michel Leymarie, Neil McWilliam, Le maurrassisme et la culture, op. cit., p. 173-184 ; Patricia Izquierdo, « Antiromantisme et misogynie à la Belle Époque », in Claude Millet, Politiques antiromantiques, coll. « Études romantiques et dix-neuviémistes », Paris, Classiques Garnier, 2012, p. 105-115.

[12] Charles Maurras, « Le romantisme féminin : allégorie du sentiment désordonné », in Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence, Paris, Fontemoing, coll. « Minerva », 1905, p. 234.

[13] Albert Thibaudet, « Pour la géographie littéraire » [1929], in Albert Thibaudet, Réflexions sur la littérature (éd. Antoine Compagnon, Christophe Pradeau), Paris, Gallimard, coll. « Quarto », 2007, p. 1282.

[14] Marc Angenot, La parole pamphlétaire : contribution à la typologie des discours modernes, Paris, Payot, coll. « Langages et sociétés », 1982, p. 338-341.

[15] Pierre Loubier, « La canaille élégiaque », Textuel, no 61, avril 2010, p. 41-52 ; Antonio Rodriguez, « La référence “classique” chez les “modernes” : les enjeux d’une association antiromantique en poésie (1910-1960) », Textuel, no 61, avril 2010, p. 77-79.

[16] Léon Daudet, Le stupide XIXe siècle (1789-1919), op. cit., p. 1222.

[17] Charles Maurras, Trois idées politiques [1898], in Charles Maurras, Œuvres capitales, t. 2, Paris, Flammarion, 1954, p. 64-68.

[18] Par exemple Léon Daudet, Le stupide XIXe siècle (1789-1919), op. cit., p. 1242.

[19] Gilbert Daroise, « La poésie est chose simple : à propos de Victor Hugo », L’Action française, 18 avril 1929, p. 3 ; « Sur la “mission” de Victor Hugo », L’Action française, 10 novembre 1932, p. 3

[20] Lucien Dubech, « À la Comédie-Française : Ruy Blas », L’Action française, 26 février 1923, p. 2. C’est Maurice Souriau qui rapporte, citant Le Figaro, que Caserio avait souscrit à une édition populaire des Châtiments deux mois avant son passage à l’acte (Maurice Souriau, Les idées morales de Victor Hugo, Paris, Bloud et Cie, coll. « Philosophes et penseurs », 1908, p. 68). Au moins Souriau, contrairement à Dubech, a-t-il l’honnêteté de préciser que ce vers, tiré du « Bord de la mer », est immédiatement suivi d’un poème qui s’intitule « Non », et d’un autre qui s’intitule « Sacer esto » et dont le premier vers dit : « Il ne faut pas qu’il meure ! » (Victor Hugo, Châtiments, in Victor Hugo, Œuvres complètes. Poésie II (éd. Jean Gaudon), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1985, p. 85-86 et p. 89).

[21] Charles Maurras, « Avant la fête » [1901] [en ligne], sur Maurras.net : la vie et l’œuvre de Charles Maurras, http://maurras.net/textes/25.html, s. d., consulté le 13 novembre 2017. Dans Lorsque Hugo eut les cent ans, les trois articles de 1901-1902 sont rebaptisés « Avant la fête », « Pendant la fête » et « Après la fête ».

[22] Charles Maurras, Dictionnaire politique et critique, vol. 2, op. cit., p. 254.

[23] Charles Maurras, « Avant la fête », art. cit.

[24] Textes repris dans Charles Maurras, Barbarie et poésie, Paris, Nouvelle Librairie nationale / Librairie ancienne Honoré Champion – Edouard Champion, 1925, p. 38-62.

[25] Charles Maurras, « Après la fête » [1902] [en ligne], sur Maurras.net : la vie et l’œuvre de Charles Maurras, http://maurras.net/textes/25.html, s. d., consulté le 13 novembre 2017.

[26] Charles Maurras, Dictionnaire politique et critique, vol. 2, op. cit., p. 255.

[27] Léon Daudet, Flammes, Paris, Grasset, 1930, p. 91-127.

[28] Léon Daudet, « La confusion du baroque et du sublime », L’Action française, 18 février 1926, p. 1.

[29] Léon Daudet, « La place Royale et Victor Hugo », L’Action française, 13 août 1933, p. 1.

[30] Paul Renard, L’Action française et « La vie littéraire », Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Perspectives », 2003, p. 161-168.

[31] Léon Daudet, La tragique existence de Victor Hugo, op. cit., p. 100 et p. 131.

[32] Robert Brasillach, compte rendu de La tragique existence de Victor Hugo de Léon Daudet, L’Action française, 14 octobre 1937, p. 3. Et dans un éditorial de 1933, Daudet écrivait de Hugo qu’« il subit fier, debout, l’invective à la bouche, DIX-HUIT ANS d’exil » (Léon Daudet, « La place Royale et Victor Hugo », L’Action française, 13 août 1933, p. 1). Dix-huit ans est en majuscule ; cela semble vouloir dire quelque chose comme : « C’est beaucoup plus que moi ! »

[33] Lucien Dubech, « À la Comédie-Française : Ruy Blas », art. cit., p. 2.

[34] Par exemple dans Léon Daudet, « La confusion du baroque et du sublime », art. cit., p. 1.

[35] André Bellessort, Victor Hugo : essai sur son oeuvre, Paris, Perrin et Cie, 1930, p. 323.

[36] Ibid., p. 326.

[37] C’est par exemple l’une des thèses d’André Joussain, L’esthétique de Victor Hugo. Le pittoresque dans le lyrisme et dans l’épopée : contribution à l’étude de la poésie romantique, Paris, Boivin et Cie, 1920.

[38] Marcel Proust, Le Côté de Guermantes [1920-1921], in Marcel Proust, À la recherche du temps perdu, vol. 2 (éd. Jean-Yves Tadié), Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1988, p. 783.

[39] Marc Angenot, « Léon Daudet sur Victor Hugo : chose vue », in Maxime Prévost, Yan Hamel, Victor Hugo (2003-1802) : images et transfigurations, Montréal, FIDES, 2003, p. 147.

[40] Thierry Maulnier, « L’idole insultée », L’Action française, 7 février 1935, p. 6. La vulgarité sera encore l’un des axes de sa critique contre Hugo dans son Introduction à la poésie française de 1939, il range Hugo parmi les auteurs qui ont le tort de plaire au peuple, avec Béranger ou Rostand (voir Jordi Brahamcha-marin, « La poésie de Victor Hugo dans les anthologies (1913-1942) », art. cit.).

[41] Thierry Maulnier, « L’idole insultée », art. cit., p. 5.

[42] Christophe Pradeau, « La littérature depuis le roman », in Vincent Debaene, Jean-Louis Jeannelle et al., L’histoire littéraire des écrivains, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2013, p. 139.

[43] La comparaison, menée par Grégoire Kauffmann, entre le style pamphlétaire de Drumont et celui de Maurras semble faire apparaître que le second est, sur certains points, un peu plus loin des canons du genre : même dans ses textes les plus polémiques, le chef de l’Action française tient à intellectualiser, rationaliser, démontrer son propos (Grégoire Kauffmann, « De Drumont à Maurras, une veine pamphlétaire », in Olivier Dard, Michel Leymarie, Neil McWilliam, Le maurrassisme et la culture. L’Action française : culture, société, politique (III), op. cit., p. 22).

[44] Paul Renard, L’Action française et « La vie littéraire », op. cit., p. 198-199.

[45] Stéphane Zékian, « L’antiromantisme d’extrême droite : programme, arguments, angles morts », in Marie Blaise (dir.), Réévaluations du romantisme : mutation des idées de littérature – I, Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, 2014, p. 280-284.

[46] Charles Maurras, « Romantisme et révolution » [1922], in Charles Maurras, Œuvres capitales, vol. 2, op. cit., p. 42.