GROUPE HUGO
Université Paris 7 - Equipe de recherche "Littérature et civilisation du XIX° siècle"
Présents: D. Charles, J.-C. Nabet, P. Laforgue, G. Rosa, C. Millet, S. Emmerich, S.
Petrey, V. Dufief, A. Laster, F. Chenet, F. Naugrette, G. Gerstmann.
Excusés, mais regrettés, A. Ubersfeld, A. Spiquel, G.
Malandain.
(J.C. Nabet revient sur le récent exposé de P. Laforgue, à propos de la symbolisation de l'histoire dans Les Misérables, notamment pour l'épisode de Cosette à Montfermeil.)
C. Millet retient de l'exposé qui vient d'être fait qu'il n'y aurait pas de symbolisation d'une positivité de la monarchie à travers le personnage de Cosette. Elle fait pourtant remarquer que la fin des Misérables et l'épisode du carnaval où est préfiguré le carnaval du IInd Empire contrediraient ce point de vue. L'éblouissement de Cosette l'empêcherait ultérieurement d'aller se recueillir sur la tombe de Jean
Valjean.
J.C. Nabet : Il est vrai que Cosette succombe à la noblesse comme condition sociale.
G. Rosa : Les deux vaisseaux de l'Orion et de l'Onde et l'Ombre permettent de faire le lien entre 1823 et 1815. Au-delà, si l'on veut étudier la caractérisation historique de l'année 1823, ne faut-il pas envisager tous les épisodes qui lui appartiennent: de la boule de neige ("C'était le temps de la lutte des républiques de l'Amérique méridionale contre le roi d'Espagne...vers les premiers jours de janvier 1823..." à l'arrivée au couvent non comprise: "Ce couvent, qui en 1824 existait depuis longues années..." -mais la masure Gorbeau incluse: "La barrière était tout près. En 1823, le mur d'enceinte existait encore"? J.-C. Nabet acquiesce.
Il ajoute, à propos de Gavroche, qu'il lui semble déformant de poser un simple rapport de fraternité entre Cosette et lui. Il existe, dans le roman, d'autres couples, comme Cosette-Eponine, tout aussi importants que le couple Cosette-Gavroche.
A P. Laforgue, qui pose le symbolique comme lié à une vision dégradée de l'Histoire chez VH, C. Millet rétorque qu'il y a des exemples du phénomène inverse : La Comète, la Jungfrau, ainsi que des symboles d'édification. P. Laforgue se défend en disant qu'on a trop célébré la positivité de l'idéologie hugolienne et que c'est la raison pour laquelle il prend le contre-pied de cette position.
G. Rosa : Il faut bien sûr casser l'image du pontife de la démagogie, mais en prenant garde à ne pas détruire du même coup une certaine proximité populaire de VH. Et, au niveau politique immédiat, à ne pas effacer sa localisation progressiste.
Il note incidemment le rapport entre l'histoire de la Duchesse de Berry et Ruy Blas : ce dernier rassemble en sa personne l'agent du gouvernement, Simon Deutz, qui avait trahi la duchesse et son amant-mari, le comte Luchesi-Palli, qui l'avait "déshonorée".
(F. Chenet précise qu'il existe à la Maison de VH un dossier de presse sur cette fête ainsi qu'un livre d'or. Elle donne en annexe une photocopie du Beaumarchais du 6 mars 1881.)
C. Millet pense que la foule rassemblée à l'occasion de l'anniversaire de VH est comparable à celle du 14 juillet 188O.
A. Laster précise qu'à partir de 1880 jusqu'en 1961 (avec quelques interruptions pendant la période d'après-guerre), une représentation de célébration en l'honneur de VH a été donnée annuellement à la Comédie française, sans parler des commémorations au Panthéon, longtemps, quoique irrégulièrement organisées. Quant aux funérailles elles-mêmes, il faudrait vérifier la part de légende, d'ailleurs agréable au renom de Hugo, qui entre dans le récit (Barrès) des gaietés auxquelles se seraient livrés les Parisiens dans les bosquets et jardins des Champs-Elysées durant la nuit de veillée funèbre.
G. Rosa conteste le terme de "médiatique" employé selon lui de manière anachronique par F. Chenet: il suppose un "appareil idéologique d'Etat" qui n'existait pas encore et surtout pas avec les caractères qu'on lui connaît maintenant. Il s'oppose également à l'interprétation d'un texte lu par l'oratrice (voir p. 3 de l'exposé, 3ème paragraphe avant la fin) : l'auteur voit dans la fête de VH une occasion de spiritualité collective, sans faire appel à la notion d'un "besoin de fête" dans le peuple qui serait à volonté satisfait honorablement ou de manière dégradante.
C. Millet appuie ce point de vue et donne lecture d'un passage de l'Antéchrist de Renan, à propos de Néron : Néron, c'est une tête fragile livrée à l'enseignement délétère de Sénèque. Rien de plus charmant que les romantiques, s'ils se cantonnent à la littérature. Passés en politique, leur mélange des genres, leur grotesque, y pervertit l'ordre des choses sérieuses. C'est redire que les adversaires de VH ont toujours exploité le cliché du carnaval hugolien.
F. Chenet précise que les fleurs bleues et roses ont été employées pour la fête afin d'éviter le rouge. Selon G. Rosa, il s'agissait peut-être aussi d'éviter le blanc de la Fête-Dieu.
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Responsable de l'équipe : Guy Rosa.