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Séance du 24 novembre 2001

Présents : Guy Rosa, Arnaud Laster, Anne Ubersfeld, Jacques Seebacher, Pierre Georgel, Laurence Bertet, Bernard Le Drezen, Marieke Stein, Jean-Marc Hovasse, Armand Erchadi, Stéphane Mahuet, Franck Laurent, Judith Wulf, Josette Acher, Delphine Van de Sype, Bertrand Abraham, Vincent Wallez, Florence Naugrette, Vincent Guérineau, Delphine Gleizes, Denis Sellem, Colette Gryner, Françoise Chenet, Paul Shillings, Loïc Le Dauphin, Thierry Durand, Thomas Harley, Stéphane Horvath, Jean-Baptiste Amadieu, Chantal Brière, M. Zviguilski.


 

Informations

§         Editions, rééditions

 

Guy Rosa fait circuler la Correspondance de Juliette Drouet publiée par Jean Gaudon et Evelyn Blewer et qui vient de paraître  chez Fayard ; cette édition ajoute une centaine de lettres de Juliette à celles données dans l'édition de 1985 et la corrige sur plusieurs points pour ce qui concerne les lettres de V. Hugo. (A cette occasion les auditeurs attentifs apprennent qui est Jean Savant.) G. Rosa remarque à ce sujet le caractère cumulatif de la science : 2002 permet d’améliorer 1985 –pas toujours.

Le groupe Hugo découvre également le premier volume du livre de Jean-Marc Hovasse. On juge sage, au vu de son poids, la précaution prise d’en discuter en janvier.

 

F. Laurent présente en "avant-première" son anthologie des écrits politiques de Hugo au Livre de Poche, qui ne viendra en librairie qu’en décembre ou janvier. Elle donne des "textes d'intervention" de Hugo, extraits pour la plupart d'Actes et Paroles, mais pas exclusivement ; d'autres textes y figurent : la préface de 1832 au Dernier Jour d'un condamné, la plaidoirie de Hugo contre l'interdiction du Roi s'amuse, en 1832, devant le Tribunal de Commerce...

 

J. Seebacher précise, à propos de la préface du Dernier Jour d'un condamné, qu'on a souvent mis en doute la véracité de l'épouvantable histoire d'exécution dont il s'agit. Cette histoire est pourtant tout à fait véridique : elle s'est passée en réalité à Albi, et la Gazette des Tribunaux la relate... G. Rosa explique qu'il n’était pas très rare de devoir s'y reprendre à plusieurs fois ; la guillotine était mal adaptée aux cous fluets ou enfantins, échouait aussi lorsqu’on parvenait à rentrer la tête dans les épaules.

 

F. Laurent donne aussi la liste des 11 brochures qui composeront le coffret du Victor Hugo et l’Orient à paraître début décembre aux éditions Maisonneuve et Larose. Chacune est écrite par un spécialiste ; ainsi, B. Degout signe L'Orient avant les orientales. Claude Millet, Franck Laurent, Henri Meschonnic, Delphine Gleizes, Arnaud Laster, pour ne nommer que les plus célèbres, participent également. Le texte d'A. Laster, Les Orientales en musique est illustré de deux CD audio.

P. Georgel demande quelles zones géographiques désigne le terme "Orient" au XIX° siècle : le Moyen-Orient, ou l'Extrême-Orient?

F. Laurent explique : L'appellation "Orient" naît au XIX° siècle : avant, on parlait du Levant, terme extrêmement vague. La réalité que recouvre le mot "Orient" est variable selon les pays. Pour l'Angleterre, l'Orient s'étend très loin, et intègre l'Extrême-Orient. Pour la France, dont l'influence politique est plus restreinte, l'appellation désigne l'Orient moyen et méditerranéen. La "question d'Orient" s’entend de l'empire turc.

V. Wallez : Et l'Espagne?

F. Laurent : Elle est présente dans Les Orientales...

G. Rosa : Et quel est l’orient désert et où l’on s’ennuie chez Racine ?

 

Les éditions Gallimard ont réimprimé Notre-Dame de Paris de la Pléiade. J. Seebacher est satisfait : quelques corrections pourront être faites, et une ligne de commentaire, au sujet du chapitre "Les Cloches", sera ajoutée à propos des rapports entre surdité et masturbation chez les jeunes garçons. Une discussion s'engage sur ce sujet controversé : G. Rosa pense que la plaisanterie qu’on y entend maintenant y a toujours été entendue puisque tout le genre humain entend parfaitement ; F. Laurent recommande la lecture de l'ouvrage du docteur Tissot qui, outre cette épineuse question, a étudié les maladies des intellectuels...

 

A. Ubersfeld (dont Le Roi et le Bouffon, épuisé depuis cinq ou six ans,  vient d'être réédité) prépare un volume au Livre de Poche consacré au théâtre de Hugo et à son rapport avec le théâtre de son temps. L'essentiel de cet ouvrage consistera en documents iconographiques. Si quelqu'un connaît une affiche ou une illustration inédite et amusante, qu'il veuille bien en aviser A. Ubersfeld.

 

§         Vieux livres

 

J. Seebacher a fait quelques découvertes chez un marchand de livres anciens. Un ouvrage d'un certain E. Lemoine, La Congrégation des Sacré-Coeur de Jésus, de Marie et de l'Adoration perpétuelle du Saint-Sacrement du Picpus, serait intéressant à consulter au sujet du couvent des Misérables ; un autre opuscule a attiré son attention, signé du baron Taylor, franc-maçon, qui fut actif lors de la candidature de Hugo à l'Assemblée en 1848 présentée par les « cinq associations d’art et d’industrie » (voir E. Blewer). A signaler également, deux opuscules d'un certain A. Rey consacrés à la famille Hugo à Saint-Priest.

 

§         La réédition des Oeuvres complètes

 

La réédition des Oeuvres complètes Bouquins/Laffont sera annoncée lundi par Mme le ministre de la Culture. G. Rosa dispose de peu d'informations, de quelques unes pourtant : les couvertures, jugées démodées par l’éditeur, seront refaites (ce qui mettra au pilon ce qui reste des cinq tomes encore disponibles : Chantiers, Océan, Voyages, etc.). L’Etat intervient, par le CNL, mais uniquement sous forme d’avance remboursable –montant inconnu. Une édition reliée sera faite pour les bibliothèques.

Quant au contenu, il est très probable que nous puissions corriger les coquilles et nos fautes. Tous les lecteurs des Oeuvres complètes sont invités à signaler dès maintenant les erreurs qu’ils observent ou ont observées  -à G. Rosa ou à J. Seebacher. En revanche, les délais et les coûts ne permettront pas d’effectuer des « corrections d’auteur » dans les notes et notices.

P. Georgel : Quel sera le matériel utilisé? Les films (auquel cas les corrections, manuelles, seraient un travail de titan!) ou l'informatique?

G. Rosa ne sait rien de précis à ce sujet. Il semble que les films n’aient pas été aussi inutilisables que cela puisque Les Misérables ont été réimprimé au printemps dernier... Le CNL avait mission de négocier également l'accord de la maison Laffont pour une édition électronique en mode texte (une édition en mode image existe déjà, consultable uniquement à partir des postes de la BN, pour une question de droits.) Elle devait être placée à la fois sur le site de la BNF pour la lecture et sur le site Frantext pour les interrogations qu’il permet. G. Rosa ignore où en est la discussion sur ces points ; une seule chose est sûre : le texte numérisé ne sera pas chargeable (ce qui se comprend).

A.      Erchadi : Et aucune création de CD-Rom n'est prévue?

G. Rosa : Non, mais on y arrivera sans doute un jour. Pour le moment, l'expérience de la vente des CD-Rom n'est acquise que dans le secteur des encyclopédies.

Pour l'édition des Oeuvres complètes, notre souci sera de pouvoir corriger les fautes de l'édition papier, et, pour l'édition électronique, de ménager la possibilité de corrections beaucoup plus importantes et d’ajouts. Il serait tout à fait absurde de ne pas mettre en oeuvre l’évolutivité de l’édition électronique, qui est l’un de ses principaux intérêts par rapport au papier.

F. Laurent : Il serait logique de publier la petite brochure Le Retour de l'Empereur.

G. Rosa : On a déjà parlé de cette question des textes à ajouter (voir les premiers compte rendus des  réunions du groupe, en 1987). C'est un peu tard –ou trop tôt- pour en reparler maintenant. Mais nous avons, évidemment, à dresser la liste des textes qui manquent à Laffont/Bouquins –tâche d’autant plus aisée qu’on l’a déjà fait en  86-87.

 

§         La Légende des siècles, toujours!

 

G. Rosa annonce la publication d'une édition (ou d’une livre critique ?) de La Légende des siècles, chez SEDES, par Claude Rétat. A. Laster regrette qu'il s'agisse sans doute de la Première Série. Une discussion s'engage sur les deux traditions de publication de La Légende : celle qui publie les séries séparément de 1859 à 1883 et celle qui, ensuite, publie tous les poèmes dans l’ordre refondu de 1883. Remarquons que Hugo a plus vécu l’une que l’autre.

F. Laurent ne croit pas à la pertinence de l’édition Ne variateur qui a fondu les trois séries sous l’autorité, non pas de Hugo, mais de Meurice et Vacquerie.

A. Laster : A-t-on des preuves que Hugo, fatigué, ne se serait pas intéressé à cette édition?  Je n'y crois pas!

G. Rosa et F. Laurent : il y a tout de même le texte signé par Hugo qui donne tout pouvoir à Meurice et Vacquerie et aussi le contrat, qui leur réserve une portion importante des droits d’auteur.

F. Laurent : L'édition Ne varietur intègre Le Retour de l'Empereur, deux poèmes écrits en 1840 lors du retour des cendres de Napoléon. Les autres ne l’avaient jamais fait. L'un des objectifs de l'édition Ne varietur était de construire une image de la grande épopée nationale... –Mais avec l’accord de Hugo, qui n’était pas mort, s’insurge A. Laster.

P. Georgel : Et, du moment que Hugo a accepté le produit final, sa légitimité est incontestable!

G. Rosa : Disons qu'il ne s'y est pas opposé...

P. Georgel : On n'a aucune preuve que Hugo soit devenu indifférent au sort de ses livres dans les dernières années de sa vie! Même s'il n'a pas fait lui-même cette édition, elle est valable. Ce découpage de La Légende des siècles est donc parfaitement légitime, comme toute cette édition.

G. Rosa : On ne dit pas que publier la Légende de 83 est une hérésie et un scandale, mais que Hugo a publié les séries distinctement, qu’il les a soigneusement construites, ne se contentant pas de réunir au fur et à mesure tout ce qu’il avait sous la main et qu’il a longuement commenté cette construction sérielle alors qu’il n’existe pas la moindre ligne de la main de Hugo attestant le projet, la préoccupation ou l’idée de fondre les 3 séries en un seul ensemble. Que l’on compare aux Quatre vents de l'esprit qui est  un projet ancien, plusieurs fois attesté, avec des plans, des listes de poèmes, etc. Rien de tel pour La Légende des siècles de 83. Au contraire, et très clairement, dans la préface de 1859 puis dans les deux lignes de 1877.

P. Georgel : Dans ce cas, pourquoi s'est-il résigné à tout refondre dans l'édition Ne varietur?

G. Rosa : Comment le savoir ? Mais d’un côté on a un silence et de l’autre tout un travail, les manuscrits, les préfaces publiées, etc. Cela ne s’équivaut pas.

J. Seebacher : L'essentiel est que ce texte, en 1883, a été lu par un très large public, et que cette édition est donc aussi importante et aussi utile que celle de 1859.

F. Laurent : Hugo lui-même n’a pas très longtemps fait partie de ce public. Mais il est utile, c'est vrai, de lire le texte dans les deux versions. Les différences sont importantes : la réception, en particulier, a été très différente selon les versions.

G. Rosa : Certes, mais quand on a une édition à faire, il faut bien choisir et les critères du choix sont ici flagrants.

 

§         Colloques

 

Le 1° février 2002 se tiendra à la salle Médicis du Palais du Luxembourg un colloque "Victor Hugo et Cuba", organisé par l'association Cuba/coopération.  Jacques Seebacher y interviendra ; il rappelle que deux lettres de Hugo, datées de début 1870, concernent la "guerre de dix ans" et l'indépendance de cette île.

L'Université de Toulouse organise les 2 et 3 avril 2002 un colloque "Hugo : le droit, la politique, la société", dont la responsabilité scientifique a été confiée à  J. Acher.

F. Chenet indique la modification des dates du colloque qu’elle organise à Grenoble III intitulé "Construire une chimère, rêver avec Hugo". Il aura lieu à Valence du 11 au 13 octobre 2002.

G. Rosa communique l’initiative prise par deux universités en Roumanie d’organiser du 22 au 25 mai 2002 un colloque international intitulé "Qui délivre le mot... ( délivre la pensée)". Ses responsables invitent à leur faire parvenir les propositions de communication à l'adresse internet suivante: mathaliaro@yahoo.fr,  ou à : Maria Kapusa - Vulcan I

   Cluj-Napoca

   3400 Romania

 

§         Spectacles, télévision

 

F. Naugrette a vu le Ruy Blas de Brigitte Jacques à la Comédie-Française : elle est enchantée de tout : acteurs, décors, costumes inspirés de Velasquez. A. Ubersfeld ne partage qu’à moitié son avis ; elle déplore le "dramatisme" si fréquent dans les mises en scène de pièces de Hugo, et qui fait oublier que Hugo est un poète. Les metteurs en scène comme les acteurs devraient changer de diction dans les moments poétiques : le personnage ne s'adresse plus aux autres personnages de la même façon, et cette rupture doit être sensible pour le spectateur.

On n'est pas si bête à Palaiseau! A. Laster en veut pour preuve qu'on y jouait vendredi 23 novembre l'Intervention à La Mare au Diable, dans une mise en scène de  Raymonde Heudeline, en première partie d'un spectacle ou figurent aussi, en alternance, Le Ciel et l'Enfer de Mérimée, Quitte pour la peur de Vigny, et Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée de Musset. Le spectacle était réussi et le public heureux.

A. Laster signale également un spectacle de Maurice Antoni, qui lira (ou récitera) des extraits du Dernier Jour d'un condamné, précédés d'Une Comédie à propos d'une tragédie. M. Antony fera participer les spectateurs, qui seront invités à prendre un rôle. Une bonne manière, pour les membres du groupe Hugo, de s'initier à l'art dramatique! Première séance le 7 décembre à la mairie de XII° arrondissement, salle des mariages.

L'émission de Franz-Olivier Giesbert à laquelle a participé J-M. Hovasse a eu le mérite de présenter un Hugo complexe, et pas du tout consensuel ; le présentateur lui-même y a été sensible, reconnaissant que cela l'avait étonné, mais y voyant une très bonne chose.

 

§         Bicentenaire

 

J. Seebacher souhaite intéresser le Groupe à une heureuse initiative : toutes les bibliothèques municipales de Paris (45 environ) envisagent d'organiser en 2002 un vaste cycle de conférences dans leurs locaux. Il faut un thème commun, et J. Seebacher pense proposer "Hugo et Paris". Il s'agirait de conférences courtes, les membres du groupe sont assez naturellement invités à intervenir. Appel est lancé aux bonne volontés. G. Rosa, A. Laster et P. Georgel ne refusent pas leur collaboration.

 

G. Rosa remarque, amusé, la multiplication des sites internet consacrés à Hugo : la BNF, la Société des Amis de Victor Hugo, les Archives, le CNDP, tout le monde s'y met! Pour le sien, le Comité national a demandé à G. Rosa une bibliographie. Après discussion, elle a été limitée aux livres disponibles en librairie, présentés sous forme de listes. Et le portail du site de la Culture renverra au nôtre pour deux bibliographies interrogeables : le monument qui existe déjà d’une part et, de l’autre, une bibliographie sélective que J. Cassier construira librement.

F. Laurent constate que l'adresse du site apparaît de plus en plus souvent dans les bibliographies ; cette intégration des outils informatiques aux habitudes scientifiques est une bonne chose. D'ailleurs, M. Brunel, dans sa bibliographie, cite le site du Groupe, qualifié de "pôle d'excellence"...

 

G. Rosa transmet au Groupe plusieurs demandes.

D’abord celle de l'Ecole du Patrimoine, qui souhaite organiser un colloque, ou une table ronde, sur Hugo et les monuments historiques, et qui cherche des collaborateurs. Les intéressés peuvent se faire connaître à G. Rosa. P. Georgel précise que l’Ecole du Patrimoine connaît, évidemment, les spécialistes de cette discipline ; mais il lui manque encore des spécialistes de Hugo. G. Rosa suggère une recherche : les comptes rendus des réunions du Comité des monuments historiques (fondé en 1833). Massin en publie quelques-uns, où sont les autres ? P. Georgel pense que les procès-verbaux des réunions des commissions des monuments historiques sous la Monarchie de Juillet ont été publiés, il y a une quinzaine d'années, en intégralité.

 

D’autre part, le ministère de l'Education nationale cherche un(e) volontaire pour écrire quelques pages d'introduction destinées à accompagner la cassette du film Quatrevingt-Treize de Claude Santelli, dont les droits ont été achetés pour diffusion dans les établissements scolaires.

 

La revue pédagogique Le Français dans tous ses états cherche elle aussi une contribution pour un futur numéro consacré  au monstre chez Victor Hugo.  Sachant que c’est là l’objet des recherches de Junia Barreto, G. Rosa avait indiqué son nom. Impossible de la contacter, lui a-t-on répondu. –Pas du tout, elle y travaille, dit A. Laster. –Diable, dit G. Rosa, etc.

 

Par ailleurs, la ville de Montreuil-sur-Mer organise un cycle de conférences-débats en mars 2002, le vendredi, sur Hugo, Montreuil et Les Misérables. Le public (100 personnes) sera composé d'étudiants, d'universitaires et du "grand public". Montreuil cherche donc trois conférenciers. G. Rosa invite les volontaires à s’adresser directement aux responsables de Montreuil-sur-Mer par mail à otmontreuilsurmer@nordnet.fr . On peut également proposer une contribution sur Hugo au journal hebdomadaire de Montreuil.

 

P. Schillings est venu de Belgique pour présenter un projet intéressant les Cahiers de l'éducation permanente, dont un prochain numéro sera consacré à Victor Hugo dans la perspective des moyens, des fins et des limites, le cas échéant, de la culture de masse. Un article d'André Gosse traitera de la manière dont Grévisse s'est servi des textes de Hugo pour son dictionnaire.

P. Schillings s'adresse à J-M. Hovasse pour lui faire une requête : à Bruxelles, aucune rue ni aucune place ne porte le nom de Victor Hugo. Il a été proposé que, dès 2002, la place des Barricades s'appelle place des Barricades - Victor Hugo. J-M. Hovasse pourrait-il écrire une lettre à Bruxelles justifiant cette demande? L'intéressé accepte volontiers. A noter également que le 30 mai aura lieu à Bruxelles une grande manifestation pour commémorer l'exil.

 

Deux autres "visiteurs", Loïc Le Dauphin et Thierry Durand se présentent au groupe. Enseignants tous les deux, ils ont fondé en 1996 une compagnie de théâtre, "Le Théâtre de l'Etoile". Pour le Bicentenaire, cette compagnie montera une adaptation de Cromwell, qui sera jouée en octobre au Plessis-Robinson, en attendant d'autres dates et d'autres lieux. La mairie de Paris et la DRAC semblent intéressées elles aussi par ce projet.

Pour que cette adaptation soit possible, il a fallu se résoudre à réduire les scènes, pour passer de 6414 vers à 2000! Les vers de Hugo ont été respectés, et les seules petites modifications sont des ajouts de mots de liaison, destinés à assurer les soudures.

Cette adaptation a également été transformée en nouvelle, que des élèves joueront sur scène en province et à Paris. Les villes où leur passage est d'ores et déjà prévu sont Tours, Angers et Clermont-Ferrand.

 

§         Le groupe Hugo et Paris 7 : statuts et activités

 

Franck Laurent annonce la naissance, au sein de l'équipe "Littérature et Civilisation du XIX° siècle", d'un "groupe Michelet", animé par Paule Petitier. Son calendrier de travail prévoit une première réunion le samedi 8 décembre, à dix heures, dans la bibliothèque du XIX° siècle. Paule Petitier y parlera de "La Montagne : révolution du globe et révolution politique".

 

G. Rosa profite d'une question de J. Seebacher sur le statut du groupe Hugo pour éclairer la situation administrative du Groupe : seule l'équipe "Littérature et civilisation du XIX° siècle" a existence juridique au sein de Paris 7 ; elle est affectataire de la bibliothèque (salle et livres). Le groupe Hugo est lui-même l'une des "composantes fonctionnelles" de cette équipe. Les membres du groupe peuvent être "membres de l’équipe", "membres associés à l’équipe", "visiteurs" ou n’importe quoi d’autre puisque, en réalité, le Ministère ne connaît que les « membres de l’équipe » (qui doivent signer leur participation, fournir la liste de leurs publications, etc.) En fait, toutes les personnes qui participent au Groupe partagent l’unique avantage des « membres de l’équipe » : l’accès à la bibliothèque et aux services (internet, Frantext, BN Opale, photocopie, lecteur-reproducteur de microfilms (lorsqu’il aura été remplacé)...) qu’elle fournit.

F. Chenet déplore que la législation n'autorise pas un chercheur à être membre de plus de deux centres de recherches.

G. Rosa signale qu’une équipe « XIX° siècle » est en cours de formation à Paris IV.

 

Le 18 mai, le groupe Hugo accueillera Sylvie Aprile, historienne travaillant actuellement sur les exilés au XIX° siècle ; elle parlera des "Quatre obstacles à l'avenir de la République : centralisation, armée permanente, clergé fonctionnaire et magistrature inamovible".

A ce propos, F. Laurent rappelle que tous les programmes républicains des années de l'Empire (ceux de Ferry, Gambetta...) s'intéressent à ces quatre obstacles. J. Seebacher rappelle également l'idéal de Hugo : "Le moins de gouvernement possible, l'Etat  réduit à la voirie", c'est-à-dire à la sécurité et à la circulation. L'instruction, quant à elle, doit être, pour Hugo comme pour Girardin, organisée par la commune, qui est à la base de tout... D'où la sympathie de Hugo pour le système communaliste en général, et pour la Commune de Paris en particulier.

F. Laurent signale également que Jules Ferry a dit "La centralisation administrative est un legs que le Bas-Empire a fait à L'Ancien Régime qui l'a transmis au Consulat." Le jacobinisme n'est pas la référence unique du républicanisme.

 

V. Wallez a trouvé la réponse à la question posée par G. Rosa le mois dernier, à propos de Talleyrand et de sa phrase "il faut faire une immense fortune". Cet épisode est rapporté par Barras : Benjamin Constant aurait rejoint Talleyrand à la sortie d’un théâtre, après que Talleyrand eût obtenu son premier poste ministériel, le 18 juillet 1817. Dans le fiacre, Talleyrand aurait dit à Constant : "Nous tenons la place. Il faut y faire une immense fortune, une fortune immense".


Communication de Vincent Wallez  : «Etude d'un fragment dramatique»  (texte joint )


Discussion

A. Ubersfeld : Je trouve que la méthode Vinaver, que vous utilisez, ne convient pas à l'étude des Fragments. Cette méthode est une méthode dramaturgique, alors que les Fragments sont des textes isolés, qui n'évoluent pas. Cette méthode laisse passer beaucoup de choses. Par exemple, comment expliquez-vous la pluie d'infinitifs qui caractérise ce texte? C'est une question capitale! L'infinitif pointe l'absence de temps, et de sujet...

G. Rosa (malicieux): On pourrait dire que le mauvais traitement qu'inflige la dame à Maglia dissout en lui toute qualité de sujet, et qu'il ne peut plus dire "je"...

A. Ubersfeld : L'infinitif est ici généralisation d'une subjectivité. Ce texte est un fragment dramatique qui n'est pas fait pour se prolonger en drame, mais qui est confrontation entre une expérience, dont on ne sait rien, et une inexpérience, dont on ne sait rien non plus. C'est une confrontation purement verbale.

B. Abraham : Je crois qu'il faut avoir à l'esprit la dimension philologique du texte (d'où les infinitifs, les grandes références...)

 

G. Rosa : Je trouve ce fragment assez peu représentatif, précisément parce qu'il n'a pas d'aspect dramatique. Il ne présente pas, par exemple, ce décalage entre énoncé et énonciation, qui semble générer un très grand nombre des fragments. Ce propos là, Hugo en a probablement fait un fragment dramatique par défaut, parce qu'il n’avait à sa disposition aucune autre forme d’écriture : ni poésie lyrique, ni prose philosophique ou romanesque...

V. Wallez : Oui, c'est ça ; Hugo a quelque chose à dire, mais ne sait pas à qui l'attribuer.

G. Rosa : Il y a là, aussi, une autodérision visible, avec par exemple la référence à Encelade. Mais ce fragment intéresse surtout comme épreuve, par Hugo, d’une écriture à la limite des genres, de même que les Carnets se mettent à la limite du journal, du récit historique, de la polémique politique...et du carnet de compte. Ici, le fragment est à la frontière du lyrique, du dramatique, du romanesque et de l'autobiographique. Mais c'est relativement rare dans les Fragments dramatiques.

Voix à droite : Non! non!

 

V. Wallez : Beaucoup de Fragments pourtant sont construits de cette manière : une réplique très courte, à laquelle un autre personnage répond longuement. De ce côté là, ce fragment est représentatif.

G. Rosa : Mais on a là un "cas pur" : une tirade sans situation dramatique. Si Maglia s'adresse à un autre personnage au début de la tirade, c'est juste pour permettre l'insertion de son propos dans une situation dramatique. Sinon, le fragment s'autonomise entièrement.

F. Laurent : Le seul personnage constitué des Fragments dramatiques, à part don César, est Maglia, mais Maglia a cette particularité de n'apparaître que dans des fragments. Le fragment est l'occasion pour Hugo de faire apparaître un personnage "simple" ; la mise en drame du personnage le compliquerait.

A. Laster : Malgré tout, les fragments mettant en scène Maglia sont tellement nombreux que le personnage se complique tout de même.

G. Rosa (poursuivant son idée au lieu de suivre la discussion) : ...On pourrait d’ailleurs faire une étude générale des formes inabouties chez Hugo, comme l’écriture philosophique, celle du Journal de ce que j'apprends chaque jour, celle des Carnets, celle, multiple d’ailleurs, des fragments dits « choses vues ». Cela ferait un bon sujet de thèse!

F. Laurent : Les formes non abouties peuvent être non fragmentaires. Dans Choses vues, il y a une histoire de la révolution de 1848 qui n'est pas fragmentaire, et qui aurait tout à fait pu donner lieu à une oeuvre publiée.

F. Chenet : Ces Fragments dramatiques ressemblent aux textes des journaux de Hugo, comme le Journal de ce que j’apprends chaque jour.

G. Rosa : Hugo n'a pas écrit de journaux –ni pour les journaux. C’est même, assez curieusement, une des rares choses qu’il n’ait jamais écrites. Le nom du Journal de ce que j'apprends chaque jour dévie si fortement la définition du journal (intime) que c’en est à peu près le contraire.

 

D. Gleizes : Le statut génétique du fragment modifie nécessairement son interprétation : il n'est pas intégré à une pièce. Les fragments, du coup, semblent faits pour rester isolés. Mais c’est un artefact de la constitution des manuscrits. Car les « fragments » qui ont « servi » se retrouvent dans les « reliquats » et ne sont plus considérés comme « fragment dramatique » alors qu’ils ne présentent aucune différence avec ceux qui le sont. Bref, la question du statut génétique –et donc générique- de ces éléments textuels me semble hâtivement résolue lorsqu’on pose qu’il s’agit de « fragments dramatiques ». Nous ne savons rien de leur « devenir pièce ».

F. Naugrette : Si le fragment était intégré à une pièce, comment la méthode Vinaver utiliserait-elle l'ensemble de cette pièce pour étudier le fragment? Et peut-on vraiment étudier un court extrait d'une pièce sans se reporter à l'ensemble de cette pièce?

A.Ubersfeld : On peut parfaitement étudier un court extrait de pièce de théâtre sans utiliser le contexte. Souvent j'étudie ainsi un extrait de façon entièrement autonome, et je le replace ensuite dans l'ensemble de l’œuvre, pour vérifier mes hypothèses. On peut donc étudier un fragment sans regarder le reste de l’œuvre.

F. Naugrette : La différence avec un fragment, c'est qu'on ne peut pas l'étudier ensuite dans son contexte, "pour vérifier". La difficulté posée par les fragments est bien qu'ils ne supposent pas de drame imaginaire.

A.Ubersfeld : Si l'on jouait sur scène ce fragment, selon la mise en scène, le spectateur pourrait imaginer un Maglia soit malheureux en ménage, soit philosophe.

D. Gleizes, poursuivant, elle aussi, son idée : Il faudrait s'interroger sur l'effet que produit le manque d'intégration de ce fragment à une pièce.

V. Wallez : Madeleine Marion, quand elle a créé son spectacle "Egaré dans les plis du vent", avait utilisé le même type de textes, fragmentaires, mais l'objet théâtral ainsi créé avait vraiment un sens.

F. Laurent : Une fois intégré à un ensemble, fût-ce un assemblage de fragments, le fragment perd son aspect fragmentaire. On a alors un théâtre "par sketches", au sens anglais du terme ; c'est une forme théâtrale qui existe depuis un demi siècle.

V. Wallez : Il serait intéressant, pour celui qui mettrait en scène les Fragments dramatiques, d'alterner leurs tonalités, pour voir l'effet produit.

F. Chenet, poursuivant l’idée de D. Gleizes pour la faire rentrer à la maison : A quoi distingue-t-on, dans les brouillons de Hugo, que ce sont des "fragments" dramatiques? Qu'est-ce qui prouve que ces morceaux n'avaient pas pour but d'être utilisés dans une pièce? Comment les distingue-t-on des fragments de travail?

G. Rosa : Mal. Les fragments que l'on trouve dans les reliquats de oeuvres ne sont pas publiés parmi les Fragments dramatiques.  D. Gleizes a raison.

 

B. Abraham : Pour le fragment qui nous occupe aujourd'hui, n'y aurait-il pas un lien intertextuel à établir avec des textes médiévaux, souvent pleins de débats pseudo-argumentatifs sur le mariage? Victor Hugo ne joue-t-il pas là-dessus?

F. Laurent : C'est bien possible. A propos de l'orientation de ce fragment, je voudrais signaler qu'on trouve entre 1841 et 1846 beaucoup de fragments dont le locuteur principal est Maglia, qui "tape" sur tout et tout le monde. Comme cette période est pour Hugo une période d'intégration au régime politique, pendant laquelle il devait calmer sa fougue pamphlétaire, je pense que le personnage de Maglia a une utilité de "défouloir" pour Hugo.

A. Ubersfeld : On trouve Maglia déjà avant, en 1835, et ces fragments plus anciens correspondent également à une période de silence pour Hugo, entre Angelo et Ruy Blas.

G. Rosa (haerens proposito): Doit-on, effectivement, parler d’ « écriture qui se cherche » ou de "défouloir" ? c’est toute la question. Car les fragments dramatiques peuvent aussi bien apparaître, du point de vue de l’écriture et non plus des thèmes, comme une sorte de poubelle où Hugo jette du résidu. Ils sont souvent assez mauvais et très répétitifs. Fiente de la plume qui vole.

F. Laurent : A l'origine, le personnage de Maglia est bien lié au projet Madame Louis XIV, n'est-ce pas?

A. Ubersfeld. Oui

V. Wallez : Une caractéristique de ce fragment qui en fait une exception est qu'il a été repris et retravaillé. Cette reprise du texte est intéressante.

 Marieke Stein


Composante " Littérature et civilisation du 19° siècle"de l'équipe CERILAC; responsable Claude Millet
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